Potager en sol vivant

Slt,
je sais pas si au Québec c'est très répandu, mais en France, tout le monde se met aux techniques sol vivant, rendues publiques par les chaînes youtube Maraîchage Sol Vivant/Ver de Terre Production. En gros ça consiste à tendre vers le non-labour du sol, et un sol toujours couvert d'un épais paillis de broyat/paille/foin. Et ça produit comme pas possible, plus de 90% des nouvelles installations maraîchères en France se font en MSV. C'est un système incroyablement simple et efficace : il faut se trouver une source de matière azotée (fumier/tonte) et une source de matière carbonée (broyat de déchetterie, de paysagistes, ou paille), et c'est tout. Le principe c'est que c'est la vie du sol (vers de terre, champignons, bactéries) qui labourent le sol, nourrissent les plantes, les rendent plus résistantes (vérifié scientifiquement depuis). Pourquoi arrêter le labour ? Car ça dégrade les sols : on oxyde la matière organique, et on se retrouve avec des sols à une moyenne de 1-2 % de matière organique, contre 4-5 % auparavant... Une catastrophe écologique. Les plantes sont malades, donc on doit utiliser encore plus de pesticides/fongicides, le sol est nu donc il faut irriguer, bref c'est un cercle vicieux.

M'occupant des plantations d'un jardin partagé de 1800 m² en ville (je suis bénévole), j'ai voulu essayer les techniques sol vivant. On a mis ça en place depuis 3 ans, et force est de constater que ça marche... à de petits ajustages près. On a des parcelles qui avaient reçu déjà pas mal de fumier de centre équestre, et de paillis auparavant, mais avec encore beaucoup de choses "à l'ancienne" : des pommes de terre sur sol nu labouré, avec buttage de terre (un désastre), des poireaux sur sol nu (désastre aussi), et un paillis limité au pourtour des plantes au lieu de le mettre partout. Du coup je suis rentré dans le lard, j'ai dit stop, on va mettre du paillage partout, très épais (surtout qu'on en a à revendre avec la ville), et on va arrêter de travailler le sol.




Ça a marché du feu de dieu sur les parcelles précédemment bien amendées en fumier. Le sol est désormais très humifère, noir, tout pousse, ça carbure, c'est plein de vers de terre, on arrose moins voire pas du tout pour les tomates. En revanche, on a un sol de base argilo-calcaire, très sec et compact l'été, trempé l'hiver. Beaucoup de chiendent, chardon, rumex, pissenlit, etc... Du coup ne pas travailler le sol dans les zones qui n'avaient pas eu de fumier a été une erreur : ça n'a pas poussé très bien, à part quelques plantes qui supportent la compaction (poireau, quelques tomates). Du coup cette année, uniquement quand le sol est dur, on travaille à la grelinette, on met des drêches (un déchet de brasserie riche en azote qu'on a gratos) et du broyat. Et là ça produit comme pas possible... A terme, on travaillera de moins en moins le sol, il faut juste le temps que les populations de vers de terre augmentent.



On a aussi la possibilité de ne pas le travailler avec des outils, mais de semer en octobre un engrais vert d'hiver avec des plantes puissantes qui vont travailler le sol pour nous, voir photo du haut. On couche l'engrais vert à floraison en mai, avec une palette, on recouvre de drêches/broyat, et on plante deux/trois semaines plus tard, quand les plantes sont mortes et que les racines se décomposent. Ça pousse tout aussi bien dedans, l'engrais vert fait bien son boulot d'ameublissement. Il faut en revanche le laisser "s'exprimer" et ne pas le faucher/tuer avant mai, la floraison. Sinon c'est du gâchis, car l'essentiel de la biomasse est produite les 4-6 semaines avant floraison.



Souvent les questions qu'on a c'est "et pour les semis avec tout ce paillage ?". Pour les grosses graines, type fèves, haricots, petits pois, ça traverse 5/10 cm de paillage sans souci, on sème juste en poquets dans des trous faits dans le paillage, on recouvre et c'est bon. Pour la petite graine, on utilise la méthode en couche de compost. On écarte le paillis, la terre est nue, on étale une couche de 5 cm de compost bien mûr, on fait des sillons dans le compost, et on sème là-dedans. Ca empêche les adventices de germer, car on n'a pas dérangé le sol, et surtout les graines type carottes ou navets germent très bien dans du compost. Mais ça demande de grandes quantités de compost, et si on en a pas, on peut tout simplement pas faire de semis de petite graine, notre sol argileux ne fait pas un bon lit de semence. L'autre question récurrente c'est "et les limaces ?". Aucun problème chez nous, on a un grand jardin, les gastéropodes ont de quoi bouffer. Les limaces adorent les crucifères, donc un bon "truc" est de semer en engrais vert de la moutarde, du colza, etc... Elles mangeront ça et pas vos semis de radis.

Est-ce que d'autres ici font comme ça aussi ?